jeudi 1 mai 2014
L'Iboga, les hommes du Bois Sacré
L'Iboga, les hommes du Bois Sacré... par tchels0o
Mallendi, un jeune guérisseur gabonais, et son père spirituel, nous entraînent dans un voyage initiatique, du Muséum d'Histoire Naturelle de Paris, au fond de la forêt équatoriale africaine, sur les traces de l'Iboga (Tabernanthe iboga), plante divinatoire et maîtresse des cérémonies secrètes animistes. L'absorption d'Iboga permet aux initiés d'aller en voyage au pays des morts (des ancêtres), et de renaître en hommes nouveaux, avec des connaissances leur permettant de réévaluer leur présent et d'en tirer des leçons pour gérer leur vie future. Aujourd'hui, la recherche médicale occidentale étudie ces connaissances millénaires ignorées..
"Mallendi est mon “gombo”, le nom que j’ai reçu pendant mon initiation. J’ai vingt-quatre ans et je suis initié au Bwiti depuis l’âge de sept ans. On peut même dire que je suis né dans le Bwiti, puisque ma mère fut initiée pendant sa grossesse. Ma famille, mon grand-père notamment, était aussi dans le Bwiti. Je poursuis donc à la fois un itinéraire personnel et une tradition familiale. À l’âge de sept ans, j’ai commencé à partir en brousse pour acquérir la connaissance des plantes et de la forêt. J’avais un accord avec ma mère : si j’obtenais de bonnes notes à l’école, elle me laissait partir. J’ai ainsi passé beaucoup de temps à apprendre avec mon père initiateur, qui avait été initié très jeune. Plus tard j’ai initié plusieurs Occidentaux et, m’étant marié à une Française, j’ai décidé de venir en France afin de soigner les gens, mais également pour défendre le point de vue de la forêt primaire gabonaise, qui tend à disparaître. Nous projetons de créer un village thérapeutique dans le sud du Gabon, où l’on mêlerait savoir de la forêt, art traditionnel et médecine locale.
Notre savoir vient de la terre. C’est elle qui enseigne, comme elle a enseigné depuis des millénaires à nos ancêtres. En Occident, nous vivons en permanence coupés de la terre. Nous portons des chaussettes, des chaussures, marchons sur une surface goudronnée alors que le simple fait de poser la plante de son pied nu sur le sol est déjà, en soi, thérapeutique. Un “ ganga ” (guérisseur bwitiste) soigne avec la nature. Au Gabon, la nature, c’est la forêt : une immense pharmacie-bibliothèque dans laquelle on puise remèdes et savoir.
Il est évident que je vois la forêt, et la vie, d’une autre façon qu'une personne n’ayant pas été initiée. Un ganga n’analyse pas la maladie de la même manière qu’un médecin. En Afrique tout est mystique, c’est culturel. On ne meurt pas de manière “naturelle”, mais toujours pour d’autres raisons. C’est ce que le ganga va analyser, suivant la demande de la personne qui vient le voir. Guérir est la tâche et le devoir premier du ganga. Au Gabon, il joue aussi un rôle social, il fait figure de réunificateur, de médiateur lors de conflits. Il intervient sur les problèmes liés à la sorcellerie, pour purifier un lieu par exemple. Car il est le contraire du sorcier.
Le Bwiti constitue une science très profonde, certains disent que les Pharaons reçurent leur savoir des Pygmées. Toute possession d’une science peut conduire à une dérive. Guerre, pollution, bombe atomique existent aussi grâce à la science. Le Bwiti enseigne, comme une université. L’université de la forêt. Le cursus est très rigoureux, codifié, avec des échelons précis à respecter. On ne devient pas ganga en quinze jours. Cela demande une grande rigueur et beaucoup d’efforts personnels, les étapes sont nombreuses et un ganga ne peut devenir lui-même un initiateur qu’avec l’aval de ses professeurs. Les contrôles sont permanents, exactement comme l’ordre des médecins surveille le respect des règles.
Le ganga est capable de soigner beaucoup de maux. Par les plantes, bien sûr, et avec d’autres techniques acquises au cours des initiations. Le Bwiti joue sur tous les niveaux : physique, spirituel et psychologique, mais il s’agit surtout d’un travail sur l’esprit. C’est une psychanalyse… en plus poussé. Beaucoup de choses considérées comme relevant de la sorcellerie ne sont rien d’autre que des croyances. Et les croyances viennent de l’esprit. C’est parfois aussi simple que ça. Le Bwiti fonctionne de manière logique et rationnelle, même si notre conception de la rationalité diffère de celle d’un non-initié, peut-être du fait que notre perception du monde est plus complexe. ”
L’initiation
“ L’initiation ne peut se faire qu’au Gabon. Elle est basée sur l’ingestion d’une plante sacrée, l’Iboga, et se déroule en général sur trois jours, avec une phase de récapitulation de son existence, une phase de mort, et une de renaissance. Elle est suivie de veillées où l’on chante et danse. La veillée permet la réunion du groupe, mais aussi l’intégration par le corps de ce que l’on a appris par ailleurs, pendant l’initiation par exemple. Mais il est difficile de parler de cela, les veillées sont faites pour chanter et danser, c’est un moment de joie, mais aussi d’enseignement. ” Mallendi
L’Iboga
Un de ses alcaloïdes, l’ibogaïne, est utilisé dans des thérapies contre la toxicomanie et l’alcoolisme.
“ Il y a un problème en Occident avec ce que vous appelez les psychotropes. Le coté ludique des psychotropes n’existe pas au Gabon. L’iboga est une plante sacrée. La considérer comme une drogue est pour nous un non-sens. J’ai vu que l’on peut trouver de l’iboga sur internet ou dans des coffee-shops. C’est absolument contraire à une pratique saine du Bwiti, sans compter que cela peut être dangereux. L’iboga est une plante à manipuler avec précaution, elle ne peut être administrée que par un ganga dûment habilité. Et même dans le Bwiti on ne prend pas de l’iboga tout le temps. On en prend pendant l’initiation, parfois comme tonique pendant les veillées, mais ce n’est jamais une drogue. ” Mallendi
“ Il s’agit d’un alcaloïde indolique extrait de l’écorce de la racine du Tabernanthe iboga, arbuste de la famille botanique des Apocynacées, qui pousse dans les forêts équatoriales du Gabon, Guinée équatoriale, Congo et Cameroun. L’écorce de la racine est utilisée traditionnellement au Gabon, dans les cérémonies rituelles du Bwiti.
Ce principe actif suscite, depuis une dizaine d’années, un intérêt croissant dans la communauté scientifique internationale, pour plusieurs raisons :
- d’une part, grâce à sa capacité à interrompre la dépendance chimique à un certain nombre de substances toxicomanogènes : morphine, cocaïne, alcool, tabac ;
- d’autre part, par son mécanisme d’action original : modulation de la réponse de nombreux neuromédiateurs cérébraux, action sur différents systèmes (dopaminergique, sérotoninergique, glutaminergique, gabaergique).
En effet, l’ibogaïne n’est pas une thérapeutique substitutive traditionnelle et ne s’apparente pas du point de vue pharmacologique aux médicaments usuellement utilisés pour traiter les toxicomanies aux opiacées ou à la cocaïne. ”
Propriétés pharmacologiques et indications thérapeutiques de l’Ibogaïne, Professeur Jean-Noël Gassita, Département de pharmacologie et de médecine traditionnelle de la Faculté de Médecine, Libreville, Gabon.
Citation
“ Les sorciers fonctionnent selon le postulat qu’un Principe est à l’œuvre et se décline dans une infinité de formes et qu’il existe, au sein d’un système triangulaire, une interface possible pour manipuler cette force et s’y intégrer. ”
“ J’ai l’intuition qu’il est possible, une fois connecté avec cette fréquence magnifique qui irradie l’Univers, de lui renvoyer un influx actif, et ce faisant, de devenir partie prenante de ce jeu cosmique auquel la Conscience joue. Cela me semble en tout cas une finalité logique à la trajectoire folle qui m’a été imposée – qui nous a été imposée, à nous, malheureux humains éternellement déconcertés par la marche incompréhensible des étoiles. ”
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