mardi 7 octobre 2014

Mentir : une seconde nature


Pourquoi mentons-nous ? Et pourquoi mentons-nous si bien ? Parce que c’est efficace ! Qui plus est, non seulement nous mentons aux autres, mais nous nous mentons également à nous-mêmes : ce serait une façon de préserver notre santé mentale.



La duperie est omniprésente dans la littérature tout comme au cinéma. Peut-être est-ce parce que la vie quotidienne est faite de mensonges que ces histoires nous séduisent tant. Mentir est une habileté enracinée au plus profond de nous et nous l’utilisons à l’envi. Comme l’écrivait il y a plus d’un siècle l’écrivain américain Mark Twain : « Tout le monde ment, chaque jour, chaque heure, éveillé, endormi, dans ses rêves, dans ses joies, dans son deuil. Si la langue reste tranquille, ce sont les mains, les pieds, les yeux, l’attitude qui trahissent la tromperie. »

De nombreuses études psychologiques étayent cette conviction. En 2002, par exemple, le psychologue Robert Feldman, de l’Université du Massachusetts, à Amherst, a secrètement filmé des étudiants auxquels on avait demandé de parler avec un étranger. Il demanda plus tard aux étudiants d’analyser leur vidéo et de compter le nombre de mensonges qu’ils avaient racontés : 60 pour cent ont admis avoir menti au moins une fois en dix minutes de conversation ! Cela allait d’exagérations intentionnelles à de vrais mensonges. De plus, les hommes et les femmes mentaient tout autant, même si les femmes tendaient à mentir pour mettre l’étranger à l’aise, tandis que les hommes mentaient pour mieux se faire valoir.
Dans une autre étude, David Knox et Caroline Schacht, à l’Université de Caroline de l’Est, ont montré que 92 pour cent des étudiants de premier cycle universitaire admettaient avoir menti à un partenaire sexuel. Les huit pour cent restant mentaient-ils ? On sait depuis longtemps que les hommes mentent facilement au sujet du nombre de leurs conquêtes, et des recherches récentes montrent que les femmes ont tendance à minimiser le nombre de leurs expériences sexuelles. Dans une expérience, on leur demandait de répondre à des questionnaires sur leur comportement sexuel, en leur faisant croire qu’elles étaient suivies par un détecteur de mensonges : elles confessaient deux fois plus d’amants que les autres ! Les psychologues ont dû tromper leurs sujets pour leur faire avouer qu’elles avaient menti…

Ces recherches considèrent souvent le mensonge au sens littéral : dire des choses qui ne sont pas vraies. En fait, nous ne nous contentons pas de telles falsifications verbales. Nous mentons aussi par omission ou en utilisant les innombrables formes de duperies non verbales : nous nous maquillons, nous portons des postiches, nous avons recours à la chirurgie esthétique, à des vêtements et autres parures pour masquer notre apparence réelle, et nous portons des parfums artificiels pour masquer nos odeurs corporelles. Nous pleurons des larmes de crocodile, nous feignons des orgasmes et affichons de faux sourires. Les mensonges verbaux absolus ne sont qu’une toute petite partie de la vaste panoplie des duperies humaines.

La question évidente que soulève toute cette liste est : pourquoi mentons-nous si volontiers ? Parce que c’est efficace ! Les meilleurs menteurs sont avantagés par rapport à leurs semblables dans l’impitoyable lutte pour le succès reproductif, le moteur de l’évolution. Pour réussir, nous devons nous intégrer dans le tissu social, même si notre premier objectif est de nous préoccuper d’abord de nous-mêmes…

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