vendredi 21 août 2015

Alejandro Jodorowsky : Non seulement tout est vivant, mais vous pouvez transformer votre réalité par la pensée




Nous inventons nos propres fantômes.

Voici une vieille histoire japonaise (où apparaît un acte de psychomagie):
“Agonisante, une femme dit à son mari: ‘Je veux que tu sois fidèle à mon souvenir. Si tu te maries avec une autre, mon fantôme viendra te déranger !’ Il jura lui être fidèle. Quand elle mourut, il garda le deuil. Mais au bout d’un an il tomba amoureux d’une autre femme. La fantôme apparut pour lui dire : ‘Je te surveille ! Je sais ce que tu dis, quels cadeaux tu lui donnes et je peux répéter les mots avec lesquels tu lui fais la cour ! Je t’interdis de continuer à la voir !’ Se sentant ainsi surveillé, le pauvre homme ne pouvait rien faire. Il alla consulter un moine. Le moine lui dit: ‘Le fantôme dit savoir tout ce que tu fais. Alors, la prochaine fois qu’il apparaîtra, prends une poignée de riz et demande-lui combien de grains tu as dans la main. S’il te répond exactement, c’est un véritable fantôme. S’il ne te répond pas, ça signifie que tu l’as inventé’. Quand le fantôme apparut, l’homme lui demanda combien de grains de riz il avait dans son poing. Le fantôme s’est dissous !”


Nous croyons vivre libres dans le présent et cependant nous sommes conditionnés, ligotés, inhibés par les souvenirs. Ces souvenirs, imprimés dans notre cerveau, se manifestent à nous dans la vie sous la forme de fantômes. Nous croyons voir la réalité alors qu’en vérité nous ne voyons que des images de notre mémoire. Il faut défier ces fantômes ! Voir ce qui est réel et ce qui est produit par notre peur de désobéir aux interdictions. Nous ne pouvons être un adulte complet si nous n’abandonnons pas ces fantômes infantiles. Ces spectres intérieurs nous disent à chaque moment: “La vie est dangereuse, attention, fuis, ne l’affronte pas telle qu’elle est, déguise-la!”. Et c’est ainsi que la plupart de nous, par crainte du monde, le transforme en illusions, par des mensonges, drogues, activités superficielles, conscience endormie. Le moine de cette vieille histoire nous dit: “Dans ton poing tu as un nombre précis, objectif, de grains de riz : tu dois savoir combien de grains tu as”, c’est à dire, en triomphant sur ta subjectivité, tu dois savoir quelle est la réalité objective, l’affronter, travailler dans ce que tu aimes, aimer ce que tu fais et construire une vie véritable, sans crainte d’être ce que tu es en réalité. Pour vivre dans le “monde”, comme a dit le philosophe Bertrand Russell, tu dois accepter qu’il est horrible, horrible, horrible… En acceptant l’“horrible” du monde, tu peux lutter en lui, sans t’enfuir, en commençant à le transformer en le paradis que doit être tout présent réel.
Alejandro Jodorowsky : Il y a plusieurs phrases qui m’ont aidé à vivre. Comme par exemple: “Ce que je donne je me le donne, ce que je ne donne pas je me l’enlève”. “Ce que tu donnes fructifie, ce que tu ne donnes pas pourrit”. “Je ne veux rien pour moi qui ne soit pas pour les autres”. “On ne peut changer le monde, mais on peut commencer à le changer”


Tout est vivant ”.
Non seulement tout est vivant, mais tout change aussi, aucune forme n’est permanente, tout grandit, se maintient, se fane, se transforme en autre chose. Les objets qui nous entourent établissent, à leur manière, des liens avec nous. Ces liens nous aident à grandir, à nous maintenir vivant, et ensuite nous dépérissons de manière équilibrée pour faire place à une nouvelle forme de vie. Si vous vous comportez ainsi, vous êtes positifs, mais si vous persistez à demeurer sans accepter le changement, vous êtes néfastes… Grandir et seulement grandir, essayant de ne jamais cesser de se développer, conduit à des catastrophes. Se maintenir dans ce qu’on considère qu’on est, éliminant de nouveaux apports et pertes nécessaires, conduit à la pétrification. Se donner à la destruction sans laisser naître la nouveauté, est néfaste…
Ce que nous avons de plus précieux c’est la vie. Nous devons la respecter, pas seulement la nôtre, mais la vie de tout ce que naît continuellement, se maintient un temps, puis périt… Nous devons apprendre à traiter les objets personnels avec la même délicatesse que celle avec laquelle nous traitons un enfant. Les objets inutiles sont des envahisseurs, ils dévorent une partie de notre énergie. Les objets que nous traitons de manière distraite, brusquement, se vengent en nous causant des accidents. Mais si nous les traitons avec respect, ils deviennent nos alliés, nous octroyant des valeurs.
La cérémonie japonaise du thé, est un acte magique basé sur le respect des objets et la reconnaissance de leur vie secrète. Le Maître du Thé, devant quelques invités, fait bouillir de l’eau et avec des gestes précis, essentiels, fabrique un thé simple, qui par l’intense attention avec laquelle il le fait, devient un élixir sacré. À l’époque où je travaillais avec le mime Marcel Marceau, j’ai assisté à une de ces cérémonies. Voir la beauté avec laquelle le Maître manipule ses cuillers en bois, son fouet pour mélanger le thé vert en poudre avec l’eau bouillante, sa manière révérencielle de lever la bouilloire, la tendresse avec laquelle il prit la tasse qu’il m’offrit, ont changé à jamais ma conception de la vie. Cette même attention intense et respectueuse pouvait se percevoir dans les objets qui accompagnaientt le Maître dans la pièce, une fleur exquise, un paysage peint avec de sobres traits noirs sur une simple feuille de bon papier, jamais d’ornement superflu, aucune lumière blessante, et, en tout, le calme guérisseur d’un temps perçu comme éternel.
Je te recommande cet exercice :
Parcours l’endroit où tu habites. Imagine que tous les meubles et les objets sont vivants, désireux de communiquer avec toi. Dis quelques phrases à chacun d’eux les remerciant de leur aide et en leur expliquant en quoi ils te sont utiles. Aux objets ou aux meubles qui sont de trop ou te sont inutiles, demande-leur pardon de les forcer à vivre sur un territoire qui ne leur correspond pas et le plus vite possible, donnes-les à qui les appréciera et les utilisera bien. Fais la même chose avec tes vêtements, avec tes livres, tes disques, tes accessoires de cuisine…
Je te l’assure : si tu te détaches de ce qui ne te sert pas et gardes seulement ce qui t’es utile, tu apprendras à faire de même avec les personnes qui t’entourent, ensuite ton esprit, et ta mémoire. Sans objets inutiles, ton foyer devient immédiatement un temple. Sans vêtements et décorations inutiles, ton aspect devient celui d’une personne sacrée. Sans pensées, ni sentiments, ni désirs inutiles, tu acquiers la santé physique et mentale, tu connais la joie de vivre.

3.- “Tout est connecté avec tout”.
Ce que tu fais ici provoque un écho là bas. Des liens invisibles nous unissent à toutes les choses de cette planète et du Cosmos. Tout ce qui arrive dans le monde t’affecte. Il n’y a pas une seule personne, du présent du passé ou du futur, avec laquelle tu n’es pas en relation. Ce que tu donnes ou fais aux autres, tu te le donnes ou fais à toi-même. Cependant, pour pouvoir vivre ta propre vie, il t’est nécessaire de créer ton “jardin secret”. Si tu ne le fais pas, tu es envahi par tes parents, tes amis, ton chef, n’importe quel intrus, profiteur ou égo charismatique. Rempli de ces personnages, tu cesses d’être toi-même. Quand en amour tu poursuis la symbiose totale, tu commets une erreur. La solitude intérieure est absolument nécessaire. Tu dois apprendre à te défendre psychiquement et matériellement pour ne pas être envahi. Ce n’est pas de l’égoïsme mais de la survie. Tu dois avoir quelque chose qui soit seulement à toi, même si, pour commencer, c’est n’est qu’un petit objet, un coin, un animal, une plante.
J’ai connu un guérisseur mexicain, Carlos Said, qui, avant de guérir ses patients avec des rites, fumigations et herbes, leur enroulait autour du cou une grosse corde avec un nœud coulant en leur disant : “Ce nœud t’indique que cette maladie est la tienne et pas la mienne. Ce n’est pas moi qui vais la guérir, elle t’appartient. Tu comprends ? Tu es malade car tu n’as pas su soigner ce qui est à toi”. La maladie est la recherche désespérée pour avoir un territoire personnel. La première chose que tu dois faire pour donner quelque chose aux autres, c’est d’être capable de te le donner à toi-même.

4. “Tout est possible”.
Certes, pour que tout te soit possible il est nécessaire que les autres croient que ceci est vrai. Si tu veux qu’une chose soit possible, tu dois faire croire aux autres que tu peux le faire. Si les autres ne le croient pas, tu n’y parviendras pas. Ton travail alors, te rendant compte que l’énergie cosmique est partout, consistera en te convaincre que ce que tu fais est bien. Réunissant toutes tes forces, faisant des provisions de toute ta volonté, te coupant de l’inertie du passé, des nombreuses répétitions dans lesquelles s’embourbe ta famille, des angoisses que te provoque le futur, tu te submergeras dans le présent en te disant : “Si ce n’est pas maintenant, quand ? ; si ce n’est pas ici, où ? ; si ce n’est pas moi, qui ? Maintenant, ici-même est mon pouvoir. Je l’accepte et je l’absorbe. Ce présent dans lequel je vis est le même présent pour tous les êtres de l’univers, toute la matière cosmique. Cet immense pouvoir vital est en moi, dans mon corps et dans mon esprit. Je peux changer immédiatement ce qui est un poids, une habitude inutile qui me submerge dans le passé, toute défense d’être ce qu’en vérité je suis par peur de perdre, à cesser d’avoir, à être exclu(e). Je prendrai de toutes mes forces, maintenant, la décision de cesser de fumer, de dépendre émotionnellement de personne qui reconnaissent mes valeurs, de me plaindre que personne ne m’aime parce que j’ai le cœur fermé, de chercher des chefs, de mendier du travail au lieu de créer mes propres activités, etc… C’est à ce moment que je commence à me respecter… Avec qui je vis ? Qui est-ce que je fréquente ? Me rendent-ils la vie plus joyeuse ? Je me séparerai de ceux qui par leurs paroles ou leurs actes m’enlèvent la joie de vivre. Si une “amie” vient me voir pour remplir son temps et me parler d’elle-même pendant des heures, sans s’intéresser à moi, j’interromprai son bavardage en lui disant : “Il y a bon moment que tu ne me parles que de toi, tu m’as déjà vampirisé trop de temps, assez !, je romps avec toi, vas-t’en, je ne te saluerai plus”. Si tu ne sens pas avec l’autorité suffisante pour atteindre le pouvoir personnel, fais cet exercice : Donne des ordres anticipés à ce qui va naturellement arriver. Lève-toi très tôt et avant le lever du soleil, crie vers l’horizon: “J’ordonne que le soleil se lève !” Dès que tu sentiras tomber quelques gouttes, regarde vers le ciel et dit : “J’ordonne qu’il commence à pleuvoir”. Place-toi dans une rue achalandée et regarde passer les voitures en disant: “J’ordonne que les voitures avancent”. Si un patron te parle mal, pense : “J’ordonne que ce patron soit désagréable !” C’est ainsi comment tu apprendras à croire en toi-même. Après un certain temps, te sentant sûr de toi, tu pourras te dire : “Je m’ordonne de bien réaliser ceci ! La réalité peut m’obéir !”. Et la réalité t’obéira.
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