Plus nombreux sont les Hommes sur Terre, plus répandue et plus puissante est la peur, et toujours plus ténue la liberté intérieure. Moins libres sont les humains, plus ils sont contrôlables. C’est aussi simple que cela.
Quel est donc le but de toute cette logique?
La paralysie absolue.
A
terme, la Terre deviendra une vaste prison où des milliards de gens se
croiseront, se frôleront chaque jour tout en se méfiant les uns des
autres. Un monde où les bons sentiments et le savoir-vivre côtoieront
intimement la violence et le meurtre. Un monde où la peur et la haine
généralisées, parfaitement orchestrées et organisées, serviront les
intérêts de l’oligarchie régnante. Parce qu’elle stimule la productivité
commerciale, industrielle et financière, la peur est un moteur
fondamental pour encourager l’effort économique sous toutes ses formes. A
contrario, l’individu serein et « purifié » n’est pas productif : il
est détaché. Il ne projette pas sur la scène du monde ses fantasmes de
conquérant éternellement frustré. Entant que menace pour le pouvoir, les
individus « sains » seront donc définitivement écartés ou « recyclés ».
A
terme, les guerres ne seront plus menées par les nations ou déclarées
ouvertement par des leaders tout puissants mais par les peuples
eux-mêmes. Car « l’esprit de guerre » aura envahi tous les cœurs et le
peuple en aura fait son credo quotidien. Le matin dès le lever, en
allant travailler, on se dira « C’est la guerre : sois le meilleur ! ».
Du reste, c’est ce que l’on observe déjà.
- Alors, est-il possible de se débarrasser de la peur?
- Oui bien sûr… Une autre question ?
- Comment ?
- C’est là où ça se complique.
En
ouvrant ses poumons pour absorber l’oxygène, l’individu sans le savoir
aspire une quantité invraisemblable de ce que l’on a coutume d’appeler
« la peur ». Cette matière entêtante qui tout comme l’air nous
environne, caractérise le principe même de la vie terrestre. Elle
véhicule des milliards de miasmes invisibles qui, tels des microbes ou
des virus, s’insinuent en nous et prospèrent confortablement dans nos
entrailles. Chercher un hôte pour cultiver sa propre peur est une
démarche issue des origines des temps. C’est de cette façon que les
espèces ont survécu et se sont multipliées depuis le trilobite jusqu’à
l’homo sapiens.
Se
débarrasser de la peur paraît donc parfaitement impensable. Soyons donc
raisonnables, arrêtons de réagir en jeunes révoltés inconscients. Car
même l’adolescent qui rejette énergiquement les règles et vous jette à
la face qu’il n’a peur de rien se ment à lui-même. Cette réaction de
résistance ou de défense est justement engendrée par la peur.
En
fait, il existe de nombreuses formes de peur. Et la peur instinctive,
irrationnelle, n’est pas forcément la plus mauvaise. Bien au contraire.
Et les animaux en savent quelque chose. Cette sorte de sixième sens est
bien souvent fort utile et permet d’anticiper bon nombre de situations
dangereuses.
La
peur la plus dangereuse demeure très probablement celle qui est
concoctée par le mental lui-même. Nous avons dans ce cas affaire à une
démarche organisée et structurée dans le but de nuire à autrui, et par
conséquent de nous nuire à nous-même (et vice versa). C’est donc la pire
des choses qui peut être vécue émotionnellement et énergétiquement par
l’individu.
Tout
se joue donc dans son cerveau et les scénarios ne manquent pas dans la
journée. Notre quotidien est saturé de situations extrêmes et
stressantes à peine perceptibles par la conscience, reflets directs et
purs produits de nos schémas inconscients. Il en résulte une sensation
de doute permanent, très conscient en revanche, et un manque de
confiance en soi permanent. Paralysés, tétanisés ou encore dopés par ces
monstres des profondeurs, nous naviguons en eaux troubles notre vie
durant, entreprenant quelques démarches vaguement structurées. Mais bien
souvent nous nous isolons, au mieux nous « fondons une famille »,
schéma que nous vivons comme une véritable victoire, tant nous nous
sommes donnés du mal pour concrétiser ce projet fou, défiant à chaque
instant nos limites.
En
de rares et particulières occasions nous découvrons la peur comme un
objet étranger et extérieur à nous. Ainsi, la transe, quelle qu’elle
soit, nous apprend que c’est la matière physique qui est toute entière
imprégnée de peur. La danse, la méditation profonde, les NDE, les
sorties de corps, nous corrigent en nous rappelant que nous ne sommes
pas que cette désagréable émotion. Dans ces instants rares notre
conscience se libère, s’extrait de sa lourdeur habituelle et découvre un
champ d’action plus vaste, plus ludique, plus efficace, totalement
jubilatoire. L’individu fait alors l’expérience de sa nature énergétique
dont la fréquence est la même que celle de l’univers tout puissant.
Mais finalement, en réintégrant notre corps physique, nous sommes
toujours déçus et révoltés par notre injuste condition, par cette
inévitable fatalité.
Lorsque
nous vivons la présence du corps énergétique, cela a toujours un effet
guérisseur car sa réactivation à elle-seule redonne vie à notre esprit
engourdi et ravive nos cellules. Guérir c’est élever un peu notre niveau
de conscience pour être capable d’appréhender le langage mystérieux
omniprésent du monde. On découvre qu’il n’y a pas que la peur sur cette
planète, qu’il existe une certaine forme de grandeur qu’on ne sait
réellement définir car elle n’est pas répertoriée par le vocabulaire
conventionnel. C’est normal car sa simple présence à nos sens dissout le
tumulte intellectuel, annihile littéralement toute tentative de
formulation tant les mots ne sont plus à la hauteur ! Dit comme ça, cela
fait peur n’est-ce pas ?
Ah la peur ! On n’a pas fini d’en entendre parler…
Lorsque
vous vivez un sentiment de peur, vous voulez en comprendre la raison.
Vous tentez de lui donner un visage, des mobiles, vous imaginez ses
intentions, vous recherchez le coupable, invoquez des circonstances
atténuantes. En somme vous lui donnez vie, vous lui prêtez un corps,
dense, si présent qu’il prend finalement forme en vous. La peur devient
donc une réalité à laquelle vous ne pouvez plus vous soustraire. Elle
peut alors contrôler votre organisme et votre esprit à sa guise.
À
cet instant précis, asseyez-vous quelque part et immobile, contemplez
la formation de votre scénario émotionnel. Vous prendrez ainsi un peu la
mesure de son aspect artificiel et par conséquent factice. Au bout d’un
certain laps de temps la situation se sera étiolée jusqu’à en devenir
pathétique et il n’en demeurera plus qu’une vague image, un semblant
d’émotion irréelle, un sursaut, un simple stimuli tout au plus. Au bout
d’une demi-heure, vous réaliserez que vous êtes toujours le principal
instigateur de ce schéma complexe et dérangeant. Et à nouveau vous
prendrez peur !
Et
ce simple réflexe est le signe qu’un être aussi sophistiqué que vous
peut être terriblement prévisible. Avoir peur de la peur, c’est se
mordre la queue et donc dépérir. Mieux vaut l’affronter. Ainsi on y
gagne en force, on se virilise, et à terme on rencontre une lucidité qui
nous faisait tant défaut.
La
peur, les peurs, sont l’expression même de la vie terrestre, seul le
minéral échappe à cette fatalité. Tous les organismes se battent pour
survivre, tous connaissent l’agressivité et la précarité. Seul celui qui
ne « croit » plus en la vie terrestre défie ouvertement la peur. Voilà
encore une forme de transe, une forme de pouvoir, tant exploitée par les
philosophies extrémistes et autres religions fanatiques. Détruire la
vie devient à cet instant un acte normal, crédible, légitime pour celui
qui n’est plus influencé par les codes de sa masse corporelle. Et comme
je le disais plus haut, en nuisant à l’autre, il se détruit lui-même.
Affronter
la peur ce n’est pas chercher à la détruire mais plutôt dans un premier
temps à la connaître, à la comprendre. C’est encore une fois un travail
fascinant, le dernier peut-être dans un monde si prévisible.
À quoi assistons-nous aujourd’hui?
En
se fuyant lui-même par peur de ce qu’il va découvrir au fond de lui,
l’Homme s’enfonce dans un matérialisme obsessionnel jusqu’à disparaître
totalement.
Le
but est de n’avoir plus conscience de soi, des autres, des dangers de
la réalité… disparaître dans la dimension du Confort Absolu.
N’avons-nous pas affaire à une religion à part entière, avec ses
promesses de paradis et de bonheur immédiats et à un message parallèle
bien trompeur en discours de fond : les peurs ne sont qu’illusions,
elles n’ont plus lieu d’être sur cette terre promise pour celui qui
franchira la porte de ces nouveaux temples (supermarchés, centres
commerciaux, boutiques, spas, restaurants…). Certains slogans
publicitaires illustrent très bien cette nouvelle promesse: « La vie, la
vraie » (slogan Auchan 2000-2006) !!
Les
paradis artificiels, les centres de divertissements, les complexes
commerciaux, nos activités professionnelles, forment la structure de
cette nouvelle religion tentaculaire qui “préserve” l’Homme du danger,
de la mort, de la violence et de la peur.
Mais
personne n’est dupe au fond. C’est par dépit que l’humain disparaît, se
dilue dans ces rites modernes en sacrifiant sa dignité sur l’autel du
confort immédiat.
La
peur ancestrale véhicule quant à elle un message sacré que l’Homme
contemporain croit bon d’ignorer en se fondant dans ce nouveau système
« théologique » où le Divin – trop inaccessible – est supplanté par
l’hédonisme tout-puissant. N’oublions pas que cette nouvelle philosophie
s’est développée et popularisée après la seconde guerre mondiale. Elle a
été justement créée pour devenir une alternative aux guerres (peur de
la destruction finale). Elle est donc une réponse « efficace » aux
terreurs auxquelles l’humain a contribué activement tout au long de
l’Histoire.
Tant
que l’Homme n’aura pas compris que l’oubli de soi n’est pas LA Réponse,
il demeurera un couard aux yeux de l’Univers. L’hédonisme n’apporte
aucune véritable réponse, il engourdit nos sens et notre lucidité. Comme
il est réconfortant de se croire maître en terre conquise grâce à tel
titre, grade ou statut social, emprunté ça et là au hasard d’une
rencontre ou au terme d’une formation. Comme il est rassurant de se
convaincre que le « bonheur » est accessible en suivant simplement les
modes d’emploi, les préceptes préconisés par telle ou telle personnalité
à la mode.
La
peur primitive quant à elle, continuera d’agir dans nos abysses
personnels, continuera de nous provoquer notre vie durant et de susciter
moult frustrations et un vide existentiel certain. Jadis l’humain se
confrontait à cette peur comme on affronte une bête redoutable.
L’adolescent passait donc à l’âge adulte en traversant l’épreuve de sa
vie. Durant cette expérience, il n’était plus encadré par les rassurants
principes de la communauté et devait affronter SEUL la véritable nature
du monde qui l’environnait et découvrait ainsi son message secret
(voire L’Éveilleur le Tonnerre).
Si
l’Homme affrontait ses peurs, la machine économique s’effondrerait
d’elle-même. C’est justement ce que les autorités veulent éviter à tous
prix. L’insécurité est donc une valeur sûre économiquement parlant, au
même titre que l’or ou le pétrole. Pour ce faire, médias et politiciens
de connivence stimulent la crainte de l’autre et de l’avenir,
infantilisent et maternent le grand public. Ils ont encouragé la
naissance et le développement d’une société entièrement axée sur
l’Homme, toujours plus anthropocentriste, frivole et vénale à l’extrême,
qui nous assujettit à un narcissisme stérile, grâce à d’innombrables
techniques commerciales fondées sur l’hypnose. Parallèlement à cela,
nous assistons à des manœuvres officieuses qui encouragent et véhiculent
l’individualisme, la violence et la paranoïa pour finalement valoriser
et vendre en masse de faux remèdes extrêmement rentables. Voilà la
logique complexe et fondamentalement hypocrite de ce système trompeur.
Si
la peur a aujourd’hui perdu son caractère sacré et initiatique dans les
sociétés dites modernes, elle n’en demeure pas pour autant une voie
incontournable pour celui qui a soif de Vérité et de Réalité. Elle est
le passage obligé qui précède toute prise de conscience authentique
ainsi que toute renaissance. Mon récit Les Fils de l’Aurore (en
PDF sur mon site) met en lumière son incontournabilité dans toute
élévation spirituelle digne de ce nom, Éveil et peur sont
indissociables. La peur serait donc intimement liée au sens même de
l’Existence.
Nota bene pour les cinéphiles :
C’est en s’insurgeant contre les limites rassurantes qui lui sont imposées que THX 1138
(film de George Lucas 1970) se libère du destin que le système a conçu
pour lui. Il s’extirpe de la ruche en découvrant sa nature factice et
criminelle. En affrontant la peur, il dépasse sa condition de simple
produit jetable pour enfin découvrir la Vie… LA VRAIE !
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